Chapitre 220

La connaissance de soi est primordiale

Mise en garde contre l'inconscience, l'insouciance, le sommeil et la paresse

 

1. Ahab dit : «Ô sagesse, sagesse ! Quelle haute et profonde vérité, et que nous sommes infiniment bêtes et stupides ! C'est une éternelle vérité que rien ne peut exister qui ne procède auparavant d'une activité combative. Moi, le nombril de la bêtise, qui voulais aller trouver tous ceux de Bethléem pour les éclairer ! Les sages de Grèce disent que chaque qualité se conquiert durement, et que tout effet en est la conséquence. Moi qui ne le voyais pas, comment se fait-il que je le voie maintenant ?

2. Oui, tout est vain en l'homme s'il ne vit pas ce combat avec lui-même et avec les conditions de son existence ; tout ce qu'il entreprend de l'extérieur est vain !

3. Je suis parfaitement au clair quant à ces instructifs rapports internes de la vie humaine, et je serais tenté de les définir ici comme les fondements essentiels de l'existence, je n'aurais alors pas manqué mon but !» Je dis : «Parle donc, Je ne veux pas en faire l'analyse avant que tu ne te sois exprimé.»

4. Ahab dit : «Si l'homme ne se donne pas lui-même les facultés qui lui sont imparties dès le début, aucun dieu ne peut les lui accorder sans que ce soit pour sa perte. Toute chose est possible à Dieu bien sûr ! Mais l'homme n'y gagne rien !

5. Qui ne se connaît pas lui-même pour commencer ne peut connaître ni Dieu ni personne. Voilà mon principe Seigneur, suis-je loin de la vérité ?»

6. Je dis : «Non, Ahab Mon ami, tu as vraiment mis le doigt dessus. Ce que l'homme ne s'est pas acquis par ses pro­pres forces, Dieu ne peut ni ne doit le lui accorder !

7. Ne soyez donc pas que des auditeurs prétentieux de Ma parole, mais de zélés travailleurs et vous commencerez à per­cevoir en vous les bénédictions.

8. La vie est acte et non stagnation. La vie doit être maintenue par l'activité con­tinuelle des forces dont elle est faite. Se reposer ne conserve pas la vie !

9. Ce certain bien-être que vous offre le repos n'est qu'une sorte de mort des for­ces qui incitent à vivre. Qui demeure de plus en plus dans le calme inactif, notam­ment des forces vives de l'esprit, y trou­ve un certain bien-être, mais il se laisse glisser peu à peu dans les bras de la mort dont Dieu ne le libérera pas facilement.

10. Certes, il existe bien un juste calme, plein de vie. Mais il est en Dieu et pour tout homme, il est un sentiment céleste inexprimable de béatitude et de recon­naissance de faire la volonté de Dieu.

11. Cette béatitude et cette connaissan­ce très claire d'avoir fait la volonté de Dieu sont la véritable paix consciente en Dieu, pleine de vie parce que pleine des forces du faire et de l'agir. Tout autre cal­me est un arrêt des forces de vie, une vé­ritable mort ; et ces diverses forces de vie se retirent, dans la mesure où elles né sont pas réactivées ! Comprends-tu ?»

12. Judas Iscariote dit : «Seigneur, si c'est ainsi, l'homme devrait fuir le som­meil comme la peste, car le sommeil est un repos de certaines forces vitales qui ne sont que les plus extérieures !»

13. Je dis : «Certes, mais précisément les gros dormeurs ne vivent jamais long­temps ! Celui qui dort cinq heures dans sa jeunesse et six heures dans sa vieillesse parvient à un grand âge et garde long­temps un air juvénile, tandis qu'un gros dormeur vieillit plus vite, son visage se ri­de, ses cheveux grisonnent et, avant l'â­ge, il n'est plus qu'une ombre !

14. Comme le corps qui dort trop meurt peu à peu, l'âme aussi meurt lorsqu'elle abandonne l'activité qui correspond à Ma parole et à Ma volonté !

15. Quand la paresse se met à nicher dans une âme, le vice y niche aussi rapidement, car la paresse n'est que l'amour et la sa­tisfaction de soi. La paresse fuit toute oc­casion de faire quelque chose pour les autres, elle n'est au fond qu'une volonté de faire travailler les autres pour satisfaire désirs et besoins égoïstes.

16. Gardez-vous donc tout particulière­ment de la paresse, elle est le germe de tous les maux.

17. Prenez pour exemple les bêtes féro­ces ; elles ne se mettent en action pour dé­truire que lorsqu'elles sont poussées par leur faim dévorante. La proie saisie, la faim apaisée, elles s'en retournent à leur tanière où elles dorment des jours durant, les serpents notamment !

18. Regardez les voleurs, les assassins, ces gens qui détestent travailler parce qu'ils ont un démon dans la peau : ils végètent tout le jour dans leur repaire. Quand leurs acolytes leur signalent le passage d'une caravane, ils se lèvent et, avec leurs com­plices, ils tombent sur la caravane, assas­sinant tout le monde pour ne pas être trahis. Voilà le fruit de la paresse !

19. Encore une fois, gardez-vous de l’oisiveté, elle est le chemin, la porte ouverte à tous les vices imaginables.

20. Le travail fini, un repos mesuré fait du bien aux membres du corps. Mais trop de sommeil est pire que pas de sommeil du tout !»

Chapitre 221

Malédiction sur la nonchalance

Bénédiction sur l'activité

Des forts et des faibles souverains

Le sermon de la nuit ou l'enseignement de l'activité

 

1. Le Seigneur dit : «Qui a fait un long chemin à pied et atteint enfin une auber­ge ne va pas immédiatement se reposer ; il fait encore quelques petits mouvements et le lendemain matin, à l'aube, il sera sur pied et, tout le jour, il ne sentira aucune fatigue. Et plus il prolongera son voya­ge, moins il le sentira !

2. Mais si, fatigué par une journée de marche, à peine arrivé à l'auberge, il se jette sur un lit et ne se relève pas avant midi le lendemain, il reprendra la route les pieds raides et la tête lui tournera. Il finira par devoir abandonner sa route, fa­tigué et avide de repos ; il arrivera peut-être que, désespéré de voir que personne ne lui vient en aide, il restera couché au bord du chemin !

3. Mais à qui la faute ? À son excessive envie de se reposer et à la folle idée que le repos fortifie l'homme.

4. Celui qui cherche à atteindre un haut degré d'agilité de ses mains ou de ses doigts dans un art ou dans un autre, y parviendra-t-il si, sous prétexte d'attein­dre la perfection, au lieu de s'appliquer sans cesse à son exercice, les mains dans les poches, il se promène tout le jour, par crainte de fatiguer ses mains et ses doigts, par peur de les raidir ou de les rendre inaptes à l'art auquel il aspire !

5. En vérité, avec toute Ma sagesse illi­mitée, Je ne pourrais prédire le moment où un tel artiste pourrait devenir un vir­tuose ! Pour cela Mes chers amis et frè­res, Je vous le répète :

6. Il n'y a que l'activité, pour le bien gé­néral de l'homme ! Toute la vie n'est que le fruit de l'activité infatigable de Dieu. La vie ne peut être conservée que par l'ac­tivité et peut durer éternellement, alors que l'inactivité n'engendre et ne peut en­gendrer que la mort.

7. Posez vos mains sur votre coeur, vous verrez comme il est actif jour et nuit ! De son activité dépend la vie du corps, et si le coeur s'arrête, Je pense que c'en est fi­ni de la vie naturelle du corps !

8. Si l'arrêt du coeur physique est visible­ment le signe de la mort du corps, l'arrêt du cœur de l'âme est la mort de l'âme.

9. Le coeur de l'âme s'appelle l'amour et ses pulsations s'expriment par la vérita­ble et intense activité de l'amour.

10. L'incessante activité de l'amour cor­respond à cette pulsion du coeur de l'â­me qui n'est jamais fatigué. Plus le coeur de l'âme bat avec ferveur, plus la vie de l'âme est intense. Ainsi l'âme atteint un haut degré de vitalité et s'éveille à la vie divine de l'esprit.

11. Cet esprit, qui est la vie la plus pure, parce qu'elle est l'infatigable activité su­prême, se déverse dans l'âme qui, par son activité d'amour, devient semblable à lui ; c'est ainsi que cette vie indestructible a pris son commencement dans cette âme.

12. Et voyez-vous, tout vient de cette ac­tivité, jamais d'un état de paresse.

13. Fuyez le repos, recherchez l'activité et votre récompense sera la vie éternelle.

14. Ne croyez pas que Je sois venu sur cette terre pour apporter à l'homme la paix et le repos ! Oh non ! L'épée et la guerre !

15. Car les hommes doivent être stimu­lés par la détresse et les tribulations de toutes sortes, sinon ils deviennent des boeufs gras qui s'engraissent pour leur mort éternelle.

16. Les tribulations et la détresse agissent en l'homme comme la fermentation et en­gendrent ainsi finalement quelque chose de spirituel.

17. On peut dire bien sûr que la nécessité et les tribulations engendrent la colère, la vengeance, l'assassinat, la jalousie, l'endurcissement du coeur et la persécu­tion. C'est vrai, mais quoique tout cela soit mauvais, c'est encore préférable au repos et à la paresse qui ne font ni le bien ni le mal et qui sont un état de mort.

18. C'est pourquoi Je dis : — soyez à Mon égard parfaitement froids ou parfai­tement chauds ! Car je vomirai les tièdes de Ma bouche !

19. Un ennemi énergique M'est plus cher qu'un ami tiède, car l'ennemi énergique M'oblige à agir énergiquement, soit pour le gagner, soit pour le rendre à jamais inoffensif, tandis qu'à côté d'un ami tiè­de, Je deviens tiède Moi-même, et si Je suis dans la détresse, de quelle utilité Me sera cet ami tiède ?

20. C'est pourquoi un souverain tiède est la perte de son peuple, car il tue l'esprit de son peuple qui ne devient qu'un trou­peau de boeufs affamés et de bêtes de somme. Tandis qu'un souverain fort, voi­re même tyrannique, incite son peuple à être actif et vivant, puisque ce dernier s'applique à éviter les sanctions. Mais si le tyran exagère, le peuple finit toujours par le renverser pour se libérer de ses peines.

21. Je pense avoir suffisamment parlé de la valeur de l'activité et suis convaincu que vous avez tous compris cet enseigne­ment ; ainsi, que celui qui veut et sent en lui le besoin de trouver la paix du som­meil de son corps se cherche un lieu pour dormir, mais que reste ici qui veut veiller la nuit avec Moi ! » Ils s'écrièrent tous : «Seigneur, si Tu veilles, comment pourrions-nous dormir ? Seule Marie, la mère, semble avoir besoin de repos, et Tu pourrais lui dire d'aller se reposer.»

22. Mais Marie, qui somnolait derrière Moi sur un fauteuil, perçut ces mots, se redressa et dit fort aimablement à celui qui parlait : «Ami, toi qui prends toujours la parole pour tes amis, je te dirai que ton souci à mon sujet est quelque peu vain, car vois-tu, par amour pour Mon Sei­gneur, j'ai veillé déjà des centaines de nuits et je suis toujours en vie. Je veillerai en­core beaucoup d'autres et ne perdrai pas la vie pour autant, si telle est Sa volonté ! Ne vous faites donc pas de souci pour moi ! Qu'un seul pense à moi suffit !»

23. Ces mots étaient adressés à Thomas. Ce dernier vint à Marie lui demander de ne pas se méprendre sur ses bonnes inten­tions. Marie le consola, très heureuse qu'il se soit soucié d'elle ! Et Thomas se sentant le coeur plus léger regagna tran­quillement sa place.

24. Il se fit alors un certain silence, per­sonne ne disant mot, tous réfléchissant et trouvant de plus en plus lumineuse la vé­rité de ce qui avait été dit.

25. Enfin Matthieu finit par se dire en lui-même : — demain, aux premières heures du jour, cet enseignement de l'ac­tivité et du repos sera écrit en une plaquet­te séparée. En aucun cas, le monde ne doit perdre un enseignement aussi impor­tant. Et lorsqu'il se mit à faire jour, Mat­thieu tint parole. Cet enseignement fut ainsi longtemps conservé et transmis en Samarie par Jonaël et Jaïruth. Mais avec le temps, il se déforma progressivement pour finir par disparaître. Tant qu'il fut en vogue dans le peuple, il fut appelé «le sermon de la nuit.»