Chapitre 246

Pourquoi Dieu a voulu que l'âme humaine libre s'accomplisse par elle-même

 

1. (Le Seigneur :) « Il est cependant vrai qu'une âme très corrompue est or­dinairement, et en fait toujours, si faible qu'elle n'est même pas capable de maintenir sa forme humaine, et qu'elle se manifeste donc ordinairement dans l'au-delà comme une caricature à demi ou parfois même entièrement animale. Aussi une force plus grande lui sera-t-elle accordée à son insu, bien sûr progressivement ; mais il y faut la plus grande prudence, si l'on veut éviter que l'âme en soit détruite dans son identité. De plus, un tel secours lui cause tou­jours de grandes souffrances, parce qu'une telle âme est particulièrement sensible et excitable.

2. Si Je voulais la pourvoir d'un seul coup d'une trop grande force céleste, cette munificence divine conduirait l'âme à de telles affres de désespoir qu'elle se refermerait et deviendrait plus dure qu'un diamant, et il ne serait plus possible de rien y faire entrer à moins de la dissocier entièrement, ce qui causerait bien sûr à son moi un choc si violent que l'âme ne pourrait lui op­poser pour ainsi dire aucune réaction issue d'elle-même. Aussi le moi cons­cient de lui-même serait-il perdu pour au moins un éon d'années terrestres, après quoi il devrait recommencer à s'assembler et à se connaître, ce qui est bien plus difficile à l'âme dans son état de liberté désincarnée que sur cette terre, où elle dispose de l'instrument très commode du corps.

3. Ton cœur s'est serré, Mon cher Mathaël, à l'idée de cette extraordinaire longueur de temps ; mais si tu compre­nais ce qu'il faut pour libérer une âme en sorte qu'elle devienne ce qu'elle est déjà en toi à présent, tu ne te serais sans doute pas formalisé de cette durée ! Combien de temps crois-tu donc qu'il t'ait fallu pour atteindre ton présent ni­veau d'homme à l'âme déjà très accom­plie ? Si Je devais faire tous les comptes devant toi, tu en serais saisi d'effroi, et il s'en faudrait de longtemps que tu ne sois capable de concevoir cela ! Mais notre Raphaël, lui, le sait bien et en conçoit l'insondable profondeur.

4. Je peux cependant te dire une chose, à savoir que pas une seule des âmes qui sont ici n'est plus jeune que l'ensemble de la création visible des mondes ! Tu éprouves un sentiment de malaise parce que Je te dis maintenant, en toute vérité, que l'âge de vos âmes est bien supérieur à des éons d'éons d'années terrestres ; devrais-Je Moi aussi Me sentir mal à l'aise parce que Je suis éternel et que par Moi, des éons de créations se sont succédé avant vous, pendant des durées pour vous inconce­vables, et cela uniquement pour vous ?!

5. Oui, Mon ami, créer un soleil et une terre avec tout ce qu'elle porte est chose facile ! Cela ne prend pas si long­temps. Et il n'est pas plus difficile de créer des âmes d'animaux et de plantes soumises au jugement. Mais fabriquer une âme qui Me ressemble parfaitement en tout, c'est là, même pour le Créateur tout-puissant, une chose d'une extrême difficulté, parce que la toute-puissance ne peut rien y faire, mais seulement la sagesse, la patience et la plus parfaite longanimité !

6. Car lorsqu'il s'agit d'engendrer une âme toute pareille à Moi, donc une seconde divinité, très peu doit être fait par Ma toute-puissance, et tout par le nouveau Dieu en devenir issu de Moi. De moi, il ne reçoit que les matériaux, spirituels, mais aussi matériels selon ses besoins. S'il n'en était pas ainsi, s'il pouvait en être autrement, Je ne Me se­rais certes pas, Moi l'éternel Esprit créateur, infligé le pénible fardeau d'en­trer Moi-même dans la chair afin de mener plus loin, non pas par Ma toute-puissance, mais uniquement par Mon amour, les âmes parvenues à un certain point, et de leur donner une nouvelle doctrine et le nouvel esprit divin issu de Moi pour qu'elles puissent désormais, si elles le désirent vraiment, s'unir plei­nement à Moi dans le plus bref délai.

7. Je vous le dis, la récolte de Mes éternels travaux préparatoires ne fait que commencer, et vous serez bien les premiers de Mes enfants à vous accom­plir pleinement, ce qui, pourtant, conti­nue de dépendre de votre volonté et non de la Mienne. Je crois à présent, Ma­thaël, que tu voudras bien Me pardon­ner, car tu dois bien voir maintenant ce que tu ne voyais pas encore tout à l'heure ! — Cela est-il clair pour toi à présent ? »